
Ménopause : comprendre, accompagner et transformer ce passage initiatique (3/3) Première partie
Le cycle menstruel est au cœur de la vie des femmes à partir de la puberté et puis un jour il s’arrête. Ce passage est à la fois tout ce qu’il y a de plus naturel et il est en même temps sensible, tant il mobilise les ressources adaptatives de l’organisme et interpelle la femme dans sa nature profonde, sa place, son rôle.
Je vous propose ici de découvrir les enjeux essentiels de ce passage de vie, d’un point de vue physique mais aussi dans sa dimension holistique et symbolique ainsi que quelques ressources pour le traverser avec conscience, douceur, fluidité.
Ménopause, préménopause, périménopause : définitions et repères essentiels
La ménopause correspond à la cessation des menstruations depuis plus d’un an.
La période de transition qui précède cet évènement est appelé péri-ménopause ou préménopause. La durée de cette période est variable et individuelle ; l’âge auquel elle advient aussi : elle peut débuter autour de 40 ans, parfois plus tôt, et durer ainsi plusieurs années, comme ne s’étendre que sur quelques mois. L’arrêt des sécrétions hormonales peut se faire par à-coup, avec des phases d’hyposécrétions suivies de phases d’hypersécrétions, ce qui peut occasionner un tableau global instable et fluctuant.
Cet évènement est un processus physiologique. Dans une perspective plus globale, il constitue un véritable passage dans la vie d’une femme, qu’il est précieux de considérer de manière holistique : plus il sera porteur de sens, plus son vécu sera pacifié.
Les grandes étapes de la périménopause
La première phase : hyper-œstrogénie relative et déséquilibres
La première étape de la périménopause, généralement située entre 35 et 45 ans, correspond à la baisse de l’activité hormonale : le cycle devient plus court (jusqu’à 21 jours) et les règles moins abondantes.
Elle peut voir s’installer ou s’aggraver un déséquilibre entre œstrogènes et progestérone car le taux de progestérone diminue et une hyper-œstrogénie relative peut s’installer, marquée par des règles trop abondantes ou à nouveau douloureuses, du spotting en fin de cycle, des seins tendus, de la rétention d’eau au niveau abdominal et une augmentation des signes prémenstruels.
En même temps, la fertilité diminue.
Si l’hyper-œstrogénie relative persiste trop longtemps, des kystes ou des fibromes peuvent se développer.
En termes de prévention de santé, l’hyperoestrogénie constitue un facteur de risque accru de cancer (du sein en particulier).
La deuxième phase : hypo-œstrogénie et adaptation du corps
La deuxième étape de la périménopause, entre 45 et 55 ans environ, est marquée par la baisse du taux d’oestrogènes : les règles deviennent moins abondantes, les cycles s’espacent dans le temps. La dernière année, les règles peuvent survenir tous les 6 mois, avant de s’arrêter complètement.
Pendant cette période peuvent se manifester les désagréments suivants : bouffées de chaleur, troubles du sommeil ou des émotions (voire un état dépressif), sècheresse cutanée et vaginale, baisse de la libido, augmentation des graisses abdominales et diminution des graisses sous-cutanées, troubles urinaires.
Les ovaires diminuent peu à peu leur activité ; cela peut perturber le rétrocontrôle endocrine vers l’hypothalamus et l’hypophyse et occasionner des taux de FSH et LH passagèrement augmentés. Le système neuro-végétatif peut alors être perturbé et occasionner des symptômes cardiaques (palpitations), respiratoires (dyspnées), digestifs…
D’un point de vue prévention de santé, l’hypo-oestrogénie qui se manifeste à cette période est associée à un risque accru d’ostéoporose et de maladies cardio-vasculaires.
L’arrêt des règles signe une activité ovarienne est trop faible pour amener un follicule à maturité. Alors, les désagréments précédents s’apaisent et la femme entre pleinement dans une nouvelle phase de vie.
Comment vivre sa ménopause avec confort et fluidité
Pour une majorité de femmes, la ménopause est vécue sans encombre. Mais dans certains cas elle est accompagnée de diverses manifestations symptomatiques. Pour la plupart, ce sont des manifestations relatives à un déséquilibre de terrain préalable qui se révèle à l’occasion de la ménopause. En particulier, la ménopause va mettre en lumière la fragilité ou l’état de surmenage de la fonction hépatique et du système nerveux.
Selon les études réalisées, seules 15 à 25% des femmes en âge de ménopause sont dérangées par des symptômes au point de rechercher un traitement.
Parmi ces désagréments, les plaintes les plus courantes concernent les bouffées de chaleur, les troubles de l’humeur et du sommeil, la sècheresse cutanée et vaginale et les troubles de la libido, avec perte de désir. L’inquiétude peut également porter sur le maintien du capital osseux et le risque cardiovasculaire. Pour prévenir et soulager ces désagréments, la naturopathie dispose de plusieurs ressources. Au-delà des remèdes symptomatiques, ce sont bien sûr les fondations de l’hygiène de vie qui constituent le socle d’équilibre du terrain.
Les piliers d’une hygiène de vie équilibrée pendant la ménopause
Nourrir son corps avec une alimentation adaptée
Plus que jamais, l’hygiène alimentaire est précieuse. Toute l’énergie que l’organisme dépensera pour maintenir son fonctionnement optimal malgré une alimentation déséquilibrée sera une énergie non disponible pour assumer la transition hormonale.
On veillera donc particulièrement à l’équilibre et à la qualité des apports en protéines, glucides, lipides (comme évoqué dans l’article L’hygiène alimentaire ¼ L’hygiène alimentaire (1/4) - Virginie Caubert), avec une vigilance spéciale par rapport aux acides gras essentiels (omégas 3) et aux excès glucidiques, qu’ils soient quantitatifs ou qualitatifs.
On apportera également en quantité les micronutriments indispensables aux fonctions cellulaires : vitamines, minéraux, oligoéléments, antioxydants, enzymes (cf L’hygiène alimentaire 2/4 L'hygiène alimentaire (2/4) - Virginie Caubert et l’hygiène alimentaire ¾ L'hygiène alimentaire (3/4) - Virginie Caubert).
Avec une bonne hydratation, un minimum d’apports déstabilisants : excitants (café, thé, chocolat, alccol), aliments transformés ou trop cuits, grignotages ou excès en tous genres, avec des périodes de repos digestif choisies : monodiète, jeûne intermittent, jeûne court, et une relation harmonieuse avec la nourriture, vous établissez ainsi les base d’un fonctionnement facilité de votre organisme.
Le rôle essentiel du mouvement
Rien ne vaut le mouvement pour soutenir le corps, mais aussi le système neuropsychique, et favoriser les pleines capacités de fonctionnement et d’adaptation, car c’est bien d’adaptation qu’il s’agit à l’occasion de la ménopause.
Rien ne vaut le mouvement également pour faire face aux déstabilisations, qu’elles soient physiques, émotionnelles ou nerveuses. Parmi les régulateurs à notre disposition, c’est le premier, vital, puissant, irremplaçable.
Cultiver la sérénité et préserver ses ressources
Là encore, pour que vos ressources adaptatives soient disponibles pour la grande transition hormonale en cours, préservez au maximum la détente et le calme intérieur.
Cela commence avec l’alimentation et le mouvement, à quoi vous pouvez ajouter une pratique respiratoire régulière (quotidienne), des temps en nature, des séances de relaxation, des massages et, aussi souvent que possible, des moments de pause, des temps pour soi, des espaces de créativité etc.
Prévenir et soulager les inconforts liés à la ménopause
Bouffées de chaleur : réguler le système nerveux et hormonal
Les bouffées de chaleur se traduisent par une montée soudaine de chaleur depuis la poitrine jusqu’à la tête, parfois accompagnée de rougeurs ou de malaise. Elles durent de quelques secondes à quelques minutes.
Les bouffées de chaleur peuvent se produire hors contexte de ménopause, à l’occasion d’un stress, ou d’une émotion forte. Elles signent une désadaptation du système nerveux. Ce dernier transmet des informations désordonnées au système vasculaire : les capillaires se dilatent brusquement, entraînant chaleur et sueur, puis ils se resserrent à nouveau, provoquant une sensation de froid.
Les principales ressources naturopathiques sont les suivantes :
- Les nutriments importants : vitamine E, acides gras polyinsaturés (huile de lin, de germe de blé, d’onagre, de bourrache, de noix…)
- Les éléments déclencheurs : alcool, chocolat, sel et épices, tabac, café.
- Importance de l’exercice physique, régulateur du système neuro-végétatif, et de l’hygiène émotionnelle et nerveuse : pratique respiratoire, relaxation, méditation…
- Pratique de la respiration rafraîchissante du yoga : Shîtali.
- Les oligo-éléments : Zinc-cuivre
- Les plantes et huiles essentielles
- Régulatrices : mélilot, angélique, sauge, aubépine
- Adaptogènes : rhodiole, ashwaganda
- Cyprès, sauge sclarée, fragonia en aroma *
* HE contre-indiquées en cas d’antécédents de pathologie hormonodépendante.
Troubles de l’humeur et du sommeil : retrouver équilibre et apaisement
Les troubles de l’humeur et du sommeil sont une manifestation directe d’un système nerveux déstabilisé, peut-être surmené depuis trop longtemps. Irritabilité, impatience, hyper-réactivité, hypersensibilité, perméabilité accrue au stress et aux émotions, état de déprime voire dépressif, état de vulnérabilité, troubles du sommeil avec perturbation des rythmes, difficulté d’endormissement, réveils nocturnes etc. sont autant de formes que ce déséquilibre peut prendre.
Les alliés de l’équilibre nerveux sont plus que jamais de mise : alimentation riche en acides gras polyinsaturés (dont les oméga 3), en acides aminés, en vitamines et minéraux, sur le principe de la chrononutrition (cf L’hygiène alimentaire ¾ L'hygiène alimentaire (3/4) - Virginie Caubert) ; temps de repos, relaxation, méditation, respiration quotidien ; mouvement, connexion à la nature, à compléter éventuellement par des plantes adaptogènes (rhodiole, ashwaganda) ou régulatrices émotionnelles (griffonia, safran). De nombreuses huiles essentielles, utilisées en olfaction, seront aussi des ressources précieuses pour équilibrer système nerveux et émotions et le choix se fera de manière individualisée.
Sécheresse des muqueuses : soin intime et vitalité sexuelle
La muqueuse vaginale est un des principaux tissus cibles des hormones ovariennes. Les perturbations hormonales liées à la ménopause induisent des symptômes éventuels et transitoires : fragilité des muqueuses, sensibilité ou gêne à la pénétration, brûlure, démangeaisons…
La lubrification des muqueuses se fait encore, mais plus lentement. La qualité de la muqueuse change durablement mais la sensation de sècheresse est transitoire. Une invitation à reconsidérer la rencontre sexuelle, la durée des préliminaires, et à explorer d’autres zones de plaisir que la zone génitale. La stimulation sexuelle et l’orgasme restent les meilleures ressources pour stimuler la circulation et nutrition cellulaire localement.
L’hygiène nutritionnelle, physique et nerveuse considérée plus haut est bien sûr incontournable, mais encore :
- Le port de sous-vêtements en coton, et de vêtements pas trop serrés à l’entrejambe ;
- Eviter de pratiquer une douche vaginale qui modifie le pH (normalement à 5) et la flore locale ;
- Eviter les bains avec de produits non naturels
- Pratiquer régulièrement le bain dérivatif (d’ailleurs régulateur de toutes les symptomatiques liées à la ménopause).
Il peut être intéressant d’utiliser des capsules d’onagre en intravaginal pour nourrir la muqueuse, et de masser la vulve, voire l’ensemble du plancher pelvien avec de l’huile végétale (de germe de blé, d’onagre ou de bourrache), en plus des apports alimentaires.
Préserver la santé osseuse et prévenir l’ostéoporose
Le tissu osseux, comme tous les tissus de notre organisme, se régénère en permanence : il est résorbé par les ostéoclastes et généré par les ostéoblastes. S’il est vrai qu’un déficit en œstrogène (tel qu’il se manifeste lors de la ménopause) favorise l’action des ostéoclastes, la régénération osseuse se fait toujours ; elle est simplement plus lente.
L’ostéoporose résulte de multiples facteurs : déséquilibre alimentaire, sédentarité, stress… La ménopause serait donc simplement un facteur aggravant d’une hygiène de vie délétère. Et la réponse se trouve logiquement dans la mise en place d’une hygiène de vie adaptée :
- Une alimentation équilibrée, riche en micronutriments (en particulier minéraux : légumes, légumineuses, oléagineux, algues, graines germées…) et évitant les chélateurs (café, thé, chocolat, alcool, tabac) et les acidifiants (laitages, sucre ajouté et sucres cachés des aliments raffinés) ;
- Une pratique physique régulière qui maintient le capital osseux et musculaire : marche, danse, vélo… plusieurs fois par semaine
- Un sommeil de qualité car les perturbations du sommeil entravent la régénération cellulaire et tissulaire par déficit de sécrétion d’hormone de croissance.
- Une hygiène neuropsychique qui privilégie des temps de pause, relaxation, méditation et des pratiques épanouissantes : activité créative, artistique…
Ménopause : une transition vers une nouvelle phase de vie
La ménopause marque bien plus que l’arrêt du cycle menstruel : c’est une véritable transition vers une nouvelle phase de vie. En prendre soin sur le plan physique, émotionnel et énergétique permet non seulement d’en atténuer les inconforts, mais aussi d’en reconnaître la richesse et d’y voir l’origine d'une nouvelle forme d’épanouissement. Car au-delà des bouleversements hormonaux, la ménopause ouvre à une transformation profonde, qui touche l’identité, la conscience et le rapport au monde.
C’est ce versant plus symbolique et initiatique de la ménopause que j’explorerai dans la deuxième partie de cet article : comment ce passage peut devenir une porte d’entrée vers une autre manière d’habiter son corps, sa féminité et sa vie.